Les jeunes se méfient de leurs outils numériques, alors même qu’ils sont hyperconnectés. Paradoxal a première vue. Alors qu’un étudiant de la génération Y sur quatre se dit incapable de vivre sans son smartphone, ils expriment néanmoins leur méfiance quant à l’omniprésence du numérique dans leur quotidien.
Ils sont également conscients que les entreprises du numérique, comme les réseaux sociaux, utilisent leur activité à des fins commerciales, et y sont réticents. C’est un des enseignements de l’enquête «Ville & Numérique» réalisée en ligne auprès de 1 000 étudiants français par la Chaire Immobilier et Développement Durable de l’ESSEC, sous la direction du Professeur Ingrid Nappi-Choulet.
77 % d’entre eux considère que le numérique est trop présent
«Les étudiants sont lucides sur le fait que le numérique occupe une place essentielle dans leur vie et dans leur ville, place vouée à s’accroître inéluctablement» indique l’étude. Selon eux, tous les secteurs du quotidien seront fortement impactés par le numérique dans le futur: 61% d’entre eux pensent que le numérique va bouleverser nos manières de travailler, 50% les façons de se déplacer et 48% les modes de consommation. Pour autant, ils font part de «réserves surprenantes» qui démontre le «rapport ambivalent que les étudiants entretiennent avec le numérique» poursuit l’étude.
Une très large majorité trouve le numérique envahissant: 77 % d’entre eux considère que le numérique est trop présent dans le quotidien des personnes de leur génération! Ils refusent également d’être piégés, par leurs outils numériques à des fins commerciales. Près de 60% d’entre eux sont réticents à l’usage de la géolocalisation pour se voir proposer des offres marchandes. Et si ils pensent que le numérique va profondément changer le monde du travail, seuls 11 % estiment qu’ils travailleront principalement à distance, et 22 % souhaitent faire leurs achats par Internet dans un avenir proche, remettant ainsi en question le développement du télétravail et de l’e-consommation.
Vers un usage raisonné des outils numériques ?
L’étude de l’Essec donne deux explication à cette attitude paradoxale des étudiants vis à vis du numérique. La première est «le sentiment de passivité voire d’impuissance face à l’omniprésence numérique». Les étudiants subissent une hyperconnection qui est devenue presque obligatoire mais qu’ils jugent parfois «envahissante voire dangereuse». Difficile aujourd’hui de ne pas être présent et actif sur les réseaux sociaux sans perdre le fil de ses relations sociales, aussi artificielles soient-elles. Ce sentiment porte même un nom désormais, l’acronyme FOMO pour «Fear of missing out» soit «la peur de manquer quelque chose».
L’Essec observe également une «distinction opérée par une part croissante de la génération Y entre les domaines dans lesquels le numérique est utile, et ceux dans lesquels on s’en dispense volontiers». Le numérique comme créateur de lien social est massivement utiliser par les jeunes interrogés. Mais ce lien virtuel ne doit pas prendre le pas sur les relations sociales normales. Sur internet, on dit aujourd’hui, autre acronyme, que l’on rencontre parfois les gens IRL, pour «in real life», «dans la vie réelle».
L’ambivalence détectée chez les jeunes laisse penser que la génération Y sait prendre le recul nécessaire quant à l’utilisation qu’elle fait du numérique et de la place qu’ils prennent dans le quotidien. Et laisse entrevoir une volonté de contrôler l’usage qu’ils en font, de maîtriser leur consommation numérique pour ne pas se laisser submerger.